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8 mars 2012

Char de l'empereur romain

cartes VII LE CHARIOT [#] - IV L'EMPEREVR [#]

DANIEL-ROPS : Histoire de l'Eglise (tome II : les Apôtres et les Martyrs)
réalisé sous la dir. de J. Dumont 1962-1965 Librairie Arthème Fayard et Editions Bernard Grasset
[extrait] //////////////////////////////////////////////////////////////////////////

pp. 452-454 

Depuis le jour où Constantin s'était rallié au christianisme, [...] si sincère qu'eût été la conversion du grand empereur, il n'était pas sûr qu'en établissant, d'autorité, la nouvelle doctrine, il n'eût pas le dessein de s'en servir autant que de la servir. [...] Mais, entre un régime dont l'absolutisme était désormais sans limites, et une institution qui plaçait au premier plan l'affirmation de la liberté humaine en Dieu, les rapports ne pouvaient être régis par la docilité qu'eussent souhaitée les politiques. [...]

En 335, deux ans avant de disparaître, Constantin [...] avait divisé l'Empire entre ses trois fils et ses deux neveux; détruisant l'unité qu'il avait lui-même rétablie, revenant en somme à la politique de Dioclétien, il avait espéré rendre son oeuvre plus solide. Vain espoir. A peine fut-il enterré (337) qu'une insurrection éclata; les soldats mirent à mort maints membres de la famille impériale, dont ses deux neveux. Ses trois fils se repartagèrent le monde, qu'ils gouvernèrent collectivement trois ans avec trois empereurs (337-340), dix avec deux (340-350) après que Constantin II ait été tué dans une bataille contre son frère Constant. Dix ans durant, Constant dirigea l'Occident et Constance l'Orient. Mais le premier, jeune et médiocre, s'acquittait mal de sa tâche; un de ses officiers, Magnence, un Franc habile, souleva contre lui l'armée, le poursuivit à travers la Gaule et le tua au pied des Pyrénées.

Demeuré seul, ayant éliminé Magnence, Constance II (350-361) n'essaya pas de gouverner en maître unique. Tour à tour, il dut s'associer [...] ses cousins Gallus, puis Julien, ce dernier excellent adsministrateur. Des usurpateurs n'en surgissaient pas moins, de ci de là, aux ambitions entreprenantes. Entre l'empereur de Constantinople et son associé de Lutèce, les relations ne tardèrent pas à devenir fraîches. [...] La guerre civile allait reprendre, lorsqu'on apprit que Constance venait de mourir en Asie Mineure et que Julien était seul empereur. Rétablie par le hasard, l'unité ne devait pas durer longtemps. Julien régna vingt mois (361-363) avant d'être tué sur le Tigre. Après lui, Jovien, chef des gardes, couronné par l'armée, dura moins encore, huit mois (363-364), juste le temps de signer avec le roi [perse] Sapor II un traité absurde et déshonorant. Puis, de nouveau, ce fut le partage, entre Valentinien (364-375), général de l'armée panonnienne, et son frère [arien fanatique] Valens (364-378), et plus ou moins, la tension entre les deux parties de l'Empire, accentuée par les différences de foi entre les frères, un orthodoxe et un arien. La mort de Valentinien enfin ramena le désordre : à ses fils Gratien (375-383) et Valentinien II (383-392), deux enfants, on eut beau imposer un tuteur, le sage Théodose, l'anarchie reprit. De nouveaux usurpateurs apparurent, dont un redoutable, Maxime, qui tua Gratien et chassa le petit Valentinien II. Maxime pris et décapité, d'autres ambitieux surgirent encore : c'était la maladie du siècle ... Ce fut seulement en 394 qu'après une bataille terrible livrée près d'Aquilée, Théodose, déjà maître de l'Orient depuis 378, élimina ses adversaires. L'unité impériale était rétablie une fois de plus. Pas pour longtemps.

Devant un régime si visiblement sénile, la tâche de l'Eglise apparaissait facile. Une personnalité morale aussi affermie qu'elle, aussi consciente de ses destins, ne risquait pas de baisser pavillon devant un pouvoir aussi provisoire. Mais les Etats fragiles sont despotiques. Ces empereurs promis à l'assassinat ne cessent d'alourdir le poids d'une autorité si contestable. Sauf rares exceptions, tels Julien, ils se comportent comme les autocrates orientaux dont ils ont pris le cérémonial et les costumes.

Prosternations rituelles et baise-pied, titres superlatifs d'adulation, apparat prodigieux qui fait de l'étiquette une véritable liturgie : les lointains successeurs d'Auguste semblent de plus en plus les héritiers du Grand Roi de Persépolis et d'Ecbatane.

Ammien Marcellin a laissé des descriptions de cette pompe, évoquant, lors de l'entrée à Rome de Constance II, le char d'or impérial tout incrusté de pierres précieuses, les dragons éployés au haut des hampes étincelantes de gemmes, les files prodigieuses du service d'ordre, clibanaires et cataphractaires tout entiers revêtus de tissu en mailles d'acier, et, au milieu, l'empereur figé, immobile sur son char, ne cillant pas, "ne se mouchant pas, n'éternuant pas, ne tournant pas la tête, comme si son col était tenu entre des éclisses", pour témoigner par-là de sa nature surhumaine et de son incommensurable mépris.

 

A cette boursouflure du pouvoir, l'Eglise ne se laisse pas prendre. A cette pompe bouffie d'orgueil, répond une phrase toute simple, celle qu'Ossius de Cordoue écrit à Constance II, que saint Ambroise répétera à Théodose : "Souviens-toi que tu es un homme mortel !". Ainsi, par le seul fait qu'elle est fidèle aux principes de l'Evangile, apparaît-elle comme l'antidote aux excès des pouvoirs.

L'absolutisme s'étend à tous les domaines. En politique, il n'y a plus aucun contrepoids aux puissances du gouvernement. [...] Mais, en face du monstre étatique, aussi redoutable alors qu'il peut l'être à notre époque, qu'un évêque ou qu'un Père de l'Eglise se dresse et il suffit pour que l'homme se sente défendu. L'exemple le plus frappant s'observe dans l'ordre social et économique. Là, acculé par la nécessité, l'absolutisme devient féroce. Tous pour l'Etat ! Un système de contrainte universelle enserre dans un corset de fer le corps social qui défaille. Pour empêcher les ouvriers de fuir des métiers qui ne sont plus que des occasions de fiscalité, on les marque au fer rouge.  Nul ne peut plus sortir de sa classe, de sa fonction... Contre ces excès, l'Eglise s'élève. C'est elle qui réclame de Valentin Ier l'institution des défenseurs de la Cité dont la mission est de protéger le peuple contre les intolérables exigences des pouvoirs et "de lutter, comme dira Théodose lui-même (quel aveu!) contre l'insolence des officiers et l'avidité des juges". Et, sans porter le titre même, les évêques assument un rôle analogue : saint Augustin, à Hippone, sera le vrai "defensor civitatis".

 

Note de l'auteur, Daniel-Rops :

C'est dans l'institution des "défenseurs" qu'on peut saisir le point de départ du futur régime seigneurial du Moyen Age. Contre les menaces de toutes sortes, les excès de pouvoir des fonctionnaires, le péril des barbares, les petites gens ne comptant plus sur un Etat déficient tendent à demander protection à des puissants. Le fait commence vers 350 et se généralise. Un peu plus tard, Salvien a parfaitement caractérisé le mécanisme de cette opération : "Les pauvres se mettent sous la tutelle des grands, pour obtenir aide et protection. Ils deviennent colons des riches et passent sous leur domination."  Quand ces défenseurs ainsi choisis sont les évêques profondément emplis du sens de leurs devoirs, l'institution est bénéfique. Mais, dans certains cas, c'est à la force brute que les pauvres gens doivent s'en remettre, à la force armée. Ainsi, continue Salvien, "pour être défendu il faut livrer aux défenseurs toute sa substance; ainsi, pour que les pères aient protection, les fils sont-ils déshérités." 

[fin de citation] ///////////////////////////////////////////////////////////////////
Autres extraits du même ouvrage de DANIEL-ROPS dans le blog : 
Histoire des livres apocryphes [#] - Rouleaux et cahiers du IVe s. [#] - [LIVRE][BIBLE] Le Canon de Muratori [#] 

 

 L  I  E  N  S 

AMMIEN MARCELLIN : fr.wikipedia.org/wiki/Ammien_Marcellin
Traduction des Histoires (Res Gestae) d'AMMIEN MARCELLIN : 
www.weblettres.net/languesanc/?page=traductions&n=10
agoraclass.fltr.ucl.ac.be/concordances/intro.htm#amm

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