[EPEE FLAMBOYANTE] L'ange armé

L'as d'Epées des jeux de tarot est souvent représenté comme une épée flamboyante et couronnée. Dans l'iconographie, L''EPEE FLAMBOYANTE est l'attribut traditionnel de l'ange armé qui garde la porte du Paradis, lors de l'expulsion d'Adam et Eve. Parmi les plus connus de l'iconographie, figure l'ange armé de Masaccio dans la chapelle Brancacci de l'église Santa Maria del Carmine, à Florence (Italie).

Cartes d'EPEES [#]
Recherches personnelles [#]

Luciano BERTI & Rossella FOGGI : Masaccio, catalogue complet BORDAS 1991
Ed. originale : 1990 Cantini Editore, Borgo S. Croce, Florence
[extraits] ////////////////////////////////////////////////////////////////////////////

pp. 90 (Notice de Rossella Foggi)

MASACCIO : Fresque (208cm x 88cm) 
Adam et Eve chassés du Paradis (ca 1424-1448)
Florence, Santa Maria del Carmine, chapelle Brancacci
www.tohearfrometernity.com

Selon certains critiques dont Brandi, cette fresque, qui se trouve sur le pilastre gauche de la chapelle, en face de l'Adam et Eve de Masolino, fut la première réalisée par Masaccio; selon d'autres (Salmi), elle est postérieure au Baptême des néophytes; selon d'autres encore (Procacci, 1951; Bologna, 1965), elle est également précédée par le Paiement du tribut. Selon Berti, enfin (1968), des distinctions chronologiques n'ont que peu de sens pour un laps de temps globlement aussi bref, [...] Les quatre journées de travail exigées par cette fresque ont pu être décomposées avec précision et publiées pour la première fois par Berti (1964, 1968) d'après les indications de Tintori : le peintre a commencé par l'ange armé, puis il a continué par Adam, puis par Eve, pour finir par la porte du paradis sur la gauche.

Le nettoyage de cette fresque en a accru encore la renommée universelle en la dépouillant des feuillages disgracieux qui couvraient le sexe des deux personnages. Cet ajout malencontreux datait de la fin du XVIIème siècle ou du début du XVIIIe : en 1652, le révérend Ottonelli et Pierre de Cortone, dans leur traité moralisateur, décrivaient encore Adam et Eve "entièrement nus". Selon Berti (1988) et Baldini (1988), cette censure pudique aurait été imposée par le très dévot pape Cosme III de Médicis vers 1670-1674.

Le fond de ciel, derrière les personnages, a également révélé une préparation à fresque de couleur gris azur, recouverte d'azurite entièrement disparue.

La scène est d'une grande intensité dramatique, que renforce sa situation face à l'Adam et Eve de Masolino. L'étroitesse de la porte du Paradis ôte tout espoir de retour aux deux personnages qui s'en vont affligés sur les durs chemins d'une terre brûlée, sous la menace de l'ange armé. On a reconnu des influences de la statuaire hellénistique tardive pour le torse d'Adam (modèle de Marsyas ?) mais aussi d'oeuvres de Donatello (le Christ de Santa Croce par exemple) dans la manière dont sont soulignées les caractéristiques anatomiques. De son côté, Eve évoque une des nombreuses "Vénus pudiques" de la statuaire gréco-romaine, mais son visage tordu de douleur et de désespoir rappelle (Berti) plus précisément celui d'Isaac dans le projet présenté par Brunelleschi au concours de 1401 pour la porte du Baptistère de Florence (aujourd'hui au musée du Bargello).

pp.19 sq. (texte de Luciano Berti)

Masolino dut avoir initialement (1414) la totalité de la commande, mais l'engagement pris [par ailleurs] avec Pippo Spano, assorti de clauses pénales lourdes en cas de non-respect des délais, lui fit associer Masaccio à l'entreprise, de même que pour la Sainte Anne Metterza. Mais toute la zone supérieure de la voûte, aujourd'hui perdue [...] est du seul Masolino, cité comme unique auteur par Vasari . [...] Où se situe le début du travail des fresquistes ? Selon nous, dès les pilastres de l'entrée avec les deux scènes d'Adam et Eve, car [...] les ombres portées si caractéristiques de la vision réaliste de Masaccio (Longhi, 1950) [sont] nettement indiquées dans Adam et Eve chassés et dans le Tribut .  [...]

détail de l'ange à l'épée
 (www.altertuemliches.at/gemaelde/masaccio-1401-1428)

Adam et Eve "en situation" à S. Maria del Carmine
Chapelle Brancacci - fresques de gauche - www.retourdactu.fr

La restauration a apporté aux fresques un renouveau semblable à celui du disque stéréophonique et compact par rapport au microsillon monophonique. On mesure mieux maintenant le modelé de la lumière dans Adam et Eve chassés du paradis terrestre, comme sur une plaque photographique qui se révèle peu à peu; le corps d'Adam devient une vibrtion lumineuse, alors que la porte du paradis perdu et le rude apprentissage de la terre sont traités de manière purement symbolique. Sous la menace inexorable de l'ange flamboyant, se fait sentir le sens du mouvement dans le long chemin de l'humanité qui commence avec ces jambes entrecroisées.

Les variations chromatiques d'Adam, vibrant de lumière (voir la tête rouge de honte, le ventre aussi et le sexe, débarrassé des feuilles, repeint de pudeur bigote du XVIIe siècle) contrastent avec Eve uniquement livide, chez qui la violence et le désespoir sont concentrés dans la bouche hurlante, le visage déformé, selon un détail repris de l'Isaac de Brunelleschi (porte de 1401). Le fond du ciel paraît avoir été d'un bleu intense, visible autour d'Adam, afin d'accentuer la rigueur d'une atmosphère nouvelle trop violente, après les douceurs nuancées du paradis à jamais perdu.

En face, par contraste, le Péché Originel, par Masolino, apparaît comme une idylle amoureuse dans la pénombre complice du bosquet d'Eden, avec ces deux corps nus ambrés disposés côte à côte et formant un angle très ouvert, comme les battants d'une porte qui tendrait à se refermer (dont on retrouve un antécédent dans les dyptiques antiques en ivoire avec des couples d'amants).
-----> la chapelle Brancacci vue par le peintre siennois Sassetta (~1392-1450) [#]

Bibliographie indiquée par l'auteur :

BALDINI (1988) : U. Baldini, "Le Figure di Adamo e Eva formate affato ignude in una cappella di una principale chiesa di Firorenza", Critica d'Arte, LIII, n°16, p. 72-77
BERTI (1968) : L. Berti, L'opera completa di Masaccio, Milan
BOLOGNA (1965) : F. Bologna, Gli affreschi della Cappella Brancacci, Milan
BRANDI : C. Brandi, polycopié de cours, université de Palerme, 1961-62
LONGHI (1950) : R. Longhi, "Gli affreschi del Carmine, Masaccio e Dante", Paragone, 9, p. 3-7
PROCACCI (1951) : U. Procacci, Masaccio, Milan, (2e édition 1952)
SALMI : M. Salmi, Masaccio, Milan 1948 - article "Masaccio", Enciclopedia Cattolica, Città del Vaticano, VIII, P. 266-271

[fin de citation]///////////////////////////////////////////////////////////////////////
Mêmes auteurs, même ouvrage, autres extraits :
Masaccio, artiste patriotique florentin - Iconographie de Saint Jérôme [#]

 L  I  E  N  S 

PERSONNAGES CITES :
BRUNELLESCHI : http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Filippo_Brunelleschi/110424
Sacrifice d'Isaac : www.insecula.com/oeuvre/photo_ME0000095989.html
oeuvres (photos) : www.wga.hu/frames-e.html?/html/b/brunelle/crucifix.html
DONATELLO, sculpteur (1386-1466) : universdesarts.fr/biographie/93/donatello.html
oeuvres (photos) : www.wga.hu/frames-e.html?/html/b/brunelle/crucifix.html
MASACCIO (1401-1428) : www.larousse.fr/encyclopedie/peinture/Masaccio/153366
www.artcyclopedia.com/artists/masaccio.html
oeuvres (photos) : www.wga.hu/frames-e.html?/html/b/brunelle/crucifix.html
MASOLINO (~1383-1447) : www.artcyclopedia.com/artists/masolino_da_panicale.html
oeuvres (photos) : www.wga.hu/frames-e.html?/html/b/brunelle/crucifix.html
VASARI Georgio (1511-1574) : agora.qc.ca/dossiers/Giorgio_Vasari
iconographie des oeuvres mentionnées dans son ouvrage, Vite de' più eccelenti architetti, pittori, et scultori italiani (Vies des plus illustres architectes, peintres et sculpteurs italiens) : easyweb.easynet.co.uk/giorgio.vasari/lives.htm

LIEUX CITES :

FLORENCE (histoire) : www.larousse.fr/encyclopedie/ville/Florence/119717
FLORENCE, Chapelle Brancacci, église Santa Maria del Carmine : fr.wikipedia.org/wiki/Chapelle_Brancacci
FLORENCE, Baptistère San Giovanni :
www.paradoxplace.com/Perspectives/Italian%20Images/Montages/Firenze/Baptistery.htm
FLORENCE, Toscane, la ville : 
histoire par Jacques Heers : www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/florence_cite_subtile.asp
les MEDICIS :  www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/les_medicis_hommes_d_argent_hommes_d_etat.asp
au Quattrocento : aparences.net/le-quattrocento/les-architectes-du-quattrocento-a-florence/
Florence au XVIe siècle : www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/aux_portes_du_paradis_florence.asp
Florence visitée au XIXe s. par Taine :  Florence vue au XIXe agora.qc.ca/documents/florence--voyage_en_italie__florence_par_hippolyte_taine

CONCEPTS :
La Renaissance : www.larousse.fr/encyclopedie/divers/Renaissance/184289