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\\\\\\\\ Le . monde . des . tarots . anciens
3 septembre 2009

Dieu existe, je L'ai rencontré (par André Frossard)

Carte XX LE JUGEMENT : Sommaire [#]
Carte LE MAT : Sommaire [
#]
Conversion : cf. [#] [
#] [#]

Louis-Oscar Frossard (1889-1946), journaliste et homme politique français de la IIIe République, fut, à 31 ans, le premier secrétaire général du parti communiste français. Son fils, André, fut élevé dans l'athéisme parfait, "celui où la question de l'existence de Dieu ne se pose même plus". Pourtant, André Frossard (1915-1995) a rencontré brusquement, à 20 ans, la vérité chrétienne, "dans une silencieuse et douce explosion de lumière" (selon les mots de son récit autobiogra-phique, paru en 1969).

En voici quelques extraits. Les sensations de *soudaineté*, de *renaissance*, de surgissement, d*'illumination* totale pourront évoquer aux amateurs de tarots anciens, par exemple, les visuels des cartes du Jugement ou du Mat. Plus important, me semble-t-il, un tel récit mérite VRAIMENT d'être connu.

   

André FROSSARD : "Dieu existe, je L'ai rencontré" - Librairie Arthème Fayard (1969)
[extraits pp. 151-152;155-157;159;161-164;165-167]
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Chemin faisant, j'espère avoir établi que rien ne me prédisposait à la religion, excepté le fait que je n'avais pas de religion. Si mes parents, de qui je n'ai jamais reçu qu'affection et bons exemples, avaient eu la foi, ils me l'eussent communiquée naturellement. Ne l'ayant pas - et encore que le socialisme n'eût pas éteint tout-à-fait le protestantisme de ma mère -, il était naturel qu'ils m'élevassent dans la conception du monde qui était la leur, et qui a été la mienne jusqu'à vingt ans. De mes jeunes années, je n'ai rien caché de ce qui devait être dit [...].

andre_frossardUn grand homme et d'un bien grand talent, à qui je racontais mon histoire, ne put s'empêcher de marquer son étonnement en s'exclament, mon récit terminé : "Je vous aime bien, mais enfin, pourquoi vous ?".

La réponse à cette question est qu'il n'y a pas de réponse. J'ai été un garçon banal, quelques faiblesses en sus, sans autres signes particuliers qu'un pied fendu par un éclat de bombe et une nette propension à l'absence intellectuelle, morale, et autant que possible, physique. Conformément à l'Ecriture, la grâce ne fait pas acception de personne et je pense avoir montré qu'en s'adressant à moi, elle s'adressait à n'importe qui.

Ce qui m'est arrivé peut arriver à tout le monde, au meilleur, au moins bon, à celui qui ne sait pas et même à celui qui croit savoir; au lecteur demain, ce soir peut-être; un jour, sûrement.

 

[...]

[André Frossard est invité à dîner par son ami journaliste, Willemin]

Le journal bouclé un peu avant cinq heures de l'après-midi, nous partîmes dans sa vieille voiture - luxe alors inouï pour les jeunes gens que nous étions - dont il fallait maintenir l'une des portières fermées avec le coude. Nous traversâmes la Seine, loin de l'Ile Saint-Louis; donc nous n'irions pas chez lui. Place Maubert, je supposai que nous allions rue Mouffetard, où s'achetaient les frites imprimées. Nous souperions donc sous les ponts. Je n'y voyais aucun inconvénient. Il nous en coûterait un franc, plus quelques sous pour la bouteille de vin remplie jusqu'au bouchon d'un liquide bleu sombre, agréablement mauve et translucide à partir du goulot. Pourtant, lorsque nous eûmes franchi sans toucher terre le carrefour dans lequel se déverse la rue Mouffetard, je donnai ma langue au chat. Après tout, nous dînerions peut-être au restaurant, encore qu'il fût bien tôt pour cela.

[...]

Nous nous arrêtâmes un peu après l'Ecole Normale Supérieure, devant mon ancienne Ecole des Arts Décoratifs. Mon compagnon descendit et, la tête inclinée dans l'encadrement de la portière, m'offrit, soit de le suivre, soit de l'attendre quelques minutes. Je l'attendrais. Il avait sans doute une visite à faire. Je le vis traverser la rue, pousser une petite porte près d'un grand portail de fer au-dessus duquel émergeait la toiture d'une chapelle. Bon, il allait prier, se confesser; se livrer enfin à l'une ou l'autre de ces activités qui prenaient beaucoup de temps aux chrétiens. Raison de plus pour rester où j'étais.

Nous sommes le 8 juillet [1935]. L'été est magnifique. Devant moi; rectiligne, la rue d'Ulm ouvre sa tranchée ensoleillée jusqu'au Panthéon [...]. Ma santé est bonne; je suis heureux, autant qu'on peut l'être, et le savoir, la soirée s'annonce agréable, et j'attends.

Je n'éprouve enfin aucune curiosité des choses de la religion, qui sont d'une autre époque.

Il est dix-sept heures dix. Dans deux minutes, je serai chrétien.

 

 

 

 

 

Athée tranquille, je n'en sais évidemment rien lorsque, lassé d'attendre la fin des incompréhensibles dévotions qui retiennent mon compagnon un peu plus qu'il ne l'avait prévu, je pousse à mon tour la petite porte de fer pour examiner de plus près, en dessinateur, ou en badaud, le bâtiment dans lequel je suis tenté de dire qu'il s'éternise (en fait, je ne l'aurai attendu, tout au plus, trois ou quatre minutes). [...]

 

La deuxième partie [de la nef] est occupée par des religieuses, la tête couverte d'un voile noir, et qui forment de sages rangées d'oiseaux repliés dans leurs travées de bois verni. J'apprendrai plus tard que ce sont des soeurs de l'"Adoration réparatrice", congrégation fondée en pieuse réplique à certains excès du printemps révolutionnaire de 1848. [...] Elles disent une sorte de prière à deux voix qui se répond à elle-même d'un bord à l'autre de la nef pour se résoudre à intervalles réguliers dans l'exclamation : gloria patri et filio, et spiritui sancto, avant de reprendre le ruissellement alterné de sa navigation paisible. Je ne sais pas que nous sommes à matines, et que je suis bercé par le léger roulis des heures canoniales.

Le fond de la chapelle est assez vivement éclairé. Au-dessus du maître-autel vêtu de blanc, un vaste appareil de plantes, de candélabres et d'ornements est dominé par une grande croix de métal ouvragé qui porte en son centre un disque d'un blanc mat. Trois autres disques de même dimension, mais d'une nuance imperceptiblement différente, sont fixés aux extrémités de la croix. Je suis déjà entré dans des églises, pour l'amour de l'art, mais je n'ai jamais vu d'ostensoir [#] habité, ni même, je crois, d'hostie, et j'ignore que je suis en face du Saint-Sacrement, vers lequel montent deux files de cierges allumés. [...] La signification de tout cela m'échappe. [...] Debout près de la porte, je cherche des yeux mon ami et je ne parviens pas à le reconnaître parmi les formes agenouillées qui me précèdent.

[...]

Tout d'abord, ces mots me sont suggérés : vie spirituelle.

Ils ne me sont pas dits, je ne les forme pas moi-même, je les entends comme s'ils étaient prononcés près de moi à voix basse par une personne qui verrait ce que je ne vois pas encore.

 

La dernière syllabe de ce prélude murmuré atteint à peine en moi la rive du conscient que commence l'avalanche à rebours. Je ne dis pas que le ciel s'ouvre; il ne s'ouvre pas, il s'élance, il s'élève soudain, fulguration silencieuse, de cette insoupçonnable chapelle dans laquelle il se trouvait mystérieusement inclus. [...] 

C'est un cristal indestructible d'une transparence infinie, d'une luminosité presque insoutenable (un degré de plus m'anéantirait) et plutôt bleue, un monde, un autre monde d'un éclat et d'une densité qui renvoient le nôtre aux ombres fragiles des rêves inachevés. Il est la réalité, il est la vérité, je la vois du rivage obscur où je suis encore retenu. Il y a un ordre dans l'univers, et à son sommet, par-delà ce voile de brume resplendissante, l'évidence de Dieu, l'évidence faite présence et l'évidence faite personne de celui-là même que j'aurais nié un instant auparavant, que les chrétiens appellent notre père, et de qui j'apprends qu'il est doux, d'une douceur à nulle autre pareille, qui n'est pas la qualité passive que l'on désigne parfois sous ce nom, mais une douceur active, brisante, surpassant toute violence, capable de faire éclater la pierre la plus dure, et, plus dur que la pierre, le coeur humain.

Son irruption déferlante, plénière, s'accompagne d'une joie qui n'est autre que l'exultation du sauvé, la joie du naufragé recueilli à temps, avec cette différence toutefois que c'est au moment où je suis hissé vers le salut que je prends conscience de la boue dans laquelle j'étais sans le savoir englouti, et je me demande, me voyant par elle encore saisi à mi-corps, comment j'ai pu y vivre, et y respirer. (...)

 

Toutes ces sensations que je peine à traduire dans le langage inadéquat des idées et des images sont simultanées, comprises les unes dans les autres, et après des années je n'en aurai pas épuisé le contenu.

[fin des extraits] /////////////////////////////////////////////////////////////////
Témoignages autobiographiques cités dans le blog :
Marcelle AUCLAIR (1899-1983), écrivain [#][#] - SOEUR EMMANUELLE (1908-2008)
[#] - André FROSSARD (1915-1995), journaliste [#] - Jacques LANZMANN, écrivain [#] - Wangari MAATHAÏ (1940-2011), scientifique [#] - Ste THERESE D'AVILA (1515-1582) [#] - André VESALE (1514-1564), anatomiste [#]

 

 

L  I  E  N  S  

ADORATION REPARATRICE :
Théodelinde DUBOUCHE, fondatrice des soeurs de l'Adoration réparatrice :
fr.wikikto.eu/index.php/Marie-Th%C3%A9r%C3%A8se_du_C%C5%93ur_de_J%C3%A9sus
L'adoration réparatrice, selon une autre congrégation religieuse :
www.ssccpicpus.fr/article.asp?iPage=2&nPage=2&contenu_ssrub=notre+vie+de+pri%E8re&contenu_rub=LA+CONGREGATION

ADORATION :
Sens de l'adoration eucharistique : www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/la-celebration-de-la-foi/les-sept-sacrements/l-eucharistie/quel-est-le-sens-de-l-adoration-eucharistique-.html 
Article de fond général sur l'adoration in "Catholic Encyclopaedia" de 1907 (en Anglais) : www.newadvent.org/cathen/01151a.htm
www.spiritualite-chretienne.com/eucharistie/eucharistie-03.html 
(très complet, en Français)   

ILLUSTRATIONS :
Portrait d'André Frossard :
4.bp.blogspot.com/_e76jGPwGaEc/SoKDiJHzWLI/AAAAAAAAA6E/QrOiYLvNBno/s1600-h/andre+frossard.jpg
sur la page catolicidad-catolicidad.blogspot.com/2009/08/dios-existe-yo-me-lo-encontre-andre.html
le Panthéon au bout de la rue d'Ulm :
www-rocq.inria.fr/who/Valerie.Gouet/Photos/Paris/diapo_10.html
la porte d'entrée de l'Ecole Normale Supérieure :
www.terresdecrivains.com/Traversee-de-Paris-sur-les-pas-du

 

 

 

 

 

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